Les orientations de gestion servent de cadre général aux mesures concrètes de gestion qui s'apliqueront sur le site.
Elles s'appuient sur les diagnostics réalisés, sont discutées en groupe de travail et identifient donc les problématiques de conservation de l'avifaune sur le site. Elles constituent le préalable aux mesures de gestion.
Il est ici important de rappeler que l'archipel jouit d'ores et déjà de nombreuses mesures et initiatives en faveur des oiseaux.
Il s'agit donc de s'appuyer sur l'existant pour améliorer l'accueil des oiseaux à Chausey. Parmi cette gestion existante, citons le partenariat ancien entre la SCI des îles Chausey (propriétaire privé unique des îlots de l'archipel) et le Groupe ornithologique normand qui a abouti à la mise en place d'une réserve ornithologique conventionnée sur laquelle sont mises en place, outre des suivis réguliers, des actions en faveur des oiseaux.
Plus récemment, le Conservatoire du littoral et son gestionnaire, le Syndicat mixte des espaces littoraux de la Manche, exercent conjointement leur mission de gestion du Domaine Public Maritime. La préservation des oiseaux constitue justement l'un des enjeux identifiés dans le plan de gestion du site.
Etant donné que la gestion des îlots est complémentaire de la gestion du DPM puisque les oiseaux utilisent indiféremment l'un ou l'autre milieu pour satisfaire leurs exigences écologiques, une convention quadripartite (SCI de Chausey, Groupe ornithologique normand, Conservatoire du littoral, Syndicat mixte des espaces littoraux de la Manche) a vu le jour en 2009 afin de mutualiser les moyens humains et répondre au mieux à la protection de l'avifaune.
Le document d'objectifs de la ZPS "Iles Chausey" identifie 4 grandes orientations qui doivent permettre de protéger les oiseaux de l'archipel.
Elles répondent à une double logique :
- permettre le maintien de la fonctionnalité des milieux pour les oiseaux, ce qui signifie que les îlots puissent continuer à jouer leur rôle de site de nidification et les vasières et le milieu marin leur rôle de zones d'alimentation,
- préserver l'intégrité globale du site, en particulier par rapport aux problématiques de conservation qui dépasse l'échelle du site (réchauffement climatique, pollutions marines, fréquentation et dérangement).
1) Garantir l'intégrité et la quiétude du site pour les oiseaux
Parmi les enjeux identifiés à l'échelle du site, le maintien de la quiétude du site figure parmi les plus importants. Le dérangement constitue effectivement l'une des principales menaces pour l'avifaune, notamment en période de reproduction.
Pour ce faire, on s'appuiera sur la réglementation existante sur le site ainsi que sur les outils de gestion effectifs, tel que l'observatoire de la fréquentation mis en place récemment par le Conservatoire du littoral et le SyMEL.
La communication est également une réponse importante, en ce qu'elle permet de sensibiliser le grand public à la fragilité de certaines espèces.
2) Maintenir et optimiser la capacité d'accueil des oiseaux marins nicheurs
Les îlots constituent l'habitat de reproduction privilégié pour de nombreuses espèces. Comme rapellé par ailleurs, la répartition des oiseaux est étroitement conditionné par la structure de la végétation. Des mesures de gestion de la végétation peuvent donc être envisagées en fonction des espèces que l'on souhaite favoriser.
Des aménagements artificiels peuvent également être réalisés pour favoriser l'installation d'espèces. L'océanite tempête, oiseau qui passe le plus clair de son temps en haute mer et niche en milieu insulaire, est absent de l'archipel alors que les conditions écologiques sont a priori favorables à sa présence. La nidification des sternes peut, quant à elle, être facilitée par la pose de "baignoires" remplies de sable, afin de protéger les oeufs de la casse.
Mais la principale cause de problèmes pour les oiseaux nicheurs des îlots réside dans la présence du rat surmulot. Le rat est en effet un redoutable prédateur qui peut s'attaquer aux oeufs ou aux jeunes individus. Bien que l'on ne mesure pas réellement l'impact du rat sur le taux de reproduction des espèces visées, on peut néanmoins affirmer qu'il constitue un frein au succès de reproduction et peut probablement empêcher l'installation de certaines espèces, tel que l'Océanite tempête. Il s'agira donc de s'attaquer à la présence non désirée du rat, pour les oiseaux, mais aussi pour les hommes !
3) Maintenir le rôle fonctionnel du milieu marin pour les oiseaux
Il s'agit là de permettre à l'estran et au milieu marin de continuer à jouer leur rôle pour l'alimentation des oiseaux.
L'estran de Chausey se caractérise par une grande diversité d'habitats benthiques (terme qui qualifie l'interface eau-sédiment) dont certains jouent un rôle particulièrement important pour l'alimentation des oiseaux, grâce aux espèces animales qu'ils hébergent. Or, certains de ces habitats peuvent être également exploités à des fins de production conchylicole. Il s'agit donc ici de trouver le bon compromis entre l'accueil des oiseaux et l'existence de cultures marines.
L'archipel est un haut-lieu de la mytiliculture (production de moules sur bouchot) mais aussi un lieu d'hivernage pour deux espèces d'oiseaux qui se nourissent de coquillages, et en particulier des moules de bouchot : la Macreuse noire et l'Eider à duvet. Là encore, il s'agit donc de trouver les moyens permettant de limiter les dégâts dûs à la prédation par la proposition de moyens de protection passifs.
4) Poursuivre et approfondir les programmes de connaissance concernant les oiseaux
Si les colonies d'oiseaux sont bien connus et bien suivis dans l'archipel à quelques exceptions près), il existe en revanche des besoins d'amélioration de la connaissance des oiseaux en mer. Il s'agit d'un objectif d'autant plus important que ces connaissances constitue le socle de toute mesure de gestion adaptée au site. Il s'agit donc de s'intéresser à la répartition spatiale mais aussi au régime alimentaire des espèces, en vue d'envisager leur cohabitation avec les activités de pêche.
A cet égard, on s'appuiera sur les suivis et les partenariats existants mais aussi sur le développement des aires marines protégées qui permettront de de mettre en place des programmes spécifiques d'acquisition de connaissance en mer.